Le coin du Gitan


Le principe du transfert de masse en matière de conduite automobile

Ce que l'on appelle "transfert de masse" est en fait l'utilisation de l'inertie de la voiture pour glisser. L'utilisation la plus spectaculaire de ce principe, est celle faite au trophée Andros avec l'appel/contre-appel et les formidables passages des virages en glisse sur le coté, voire en marche arrière.

1) Qu'est-ce que l'inertie ?

Il s'agit de l'énergie emmagasinée par un solide, en l'occurrence la voiture, grâce à la vitesse qu'il a acquise couplée à sa masse. Par exemple, pour une même vitesse, une voiture a beaucoup moins d'inertie qu'un camion.
   
L'inertie d'une voiture a pour sens et direction le mouvement de la voiture. Ceci permet d'expliquer pourquoi si on prend de la vitesse et qu'on met la voiture en travers sur de la glace, sans accélérer ou freiner, le véhicule continue tout droit, même si on regarde par la vitre de coté la direction où l'on va.

Pour modifier la trajectoire dans ces moments là, il faut apporter une force supplémentaire. Cette force peut être l'accélération transmise par les roues ou le freinage toujours transmise par les roues.

 

2) Après ces quelques principes théoriques, passons à des exemples concrets…

Premier exemple : La Porsche 911 (propulsion)

Principale caractéristique : Survirage chronique.

J'utilise cette voiture comme exemple car elle a la particularité d'avoir son moteur en porte-à-faux arrière. C'est à dire que la masse principale de la voiture est portée à l'arrière de la voiture.

Si lors d'un passage en courbe vous levez brusquement le pied (on coupe alors la force de propulsion) ou que vous accélérez trop fort (perte d'adhérence), l'inertie du moteur prend le relais. Par l'effet de la force centrifuge, le moteur veut aller tout droit, et comme vous braquez vos roues et que l'avant a moins d'inertie, l'arrière va passer devant et donc entraîner un tête à queue dès que la limite de l'adhérence des pneus est dépassée.

Pour contrer ce tête à queue, il suffit d'accélérer à nouveau, pour redonner une autre direction à l'inertie et aussi contre braquer pour pouvoir revenir au rayon de courbure initiale du virage. Bien sûr, on ne peut pas récupérer toutes les glisses comme cela.

Si vos pneus n'ont plus de grip et/ou si l'arrière est trop engagé en glisse (par exemple à 90° par rapport à votre trajectoire):

- vous ne pourrez pas transmettre votre accélération pour contrer la glisse;

- la force que vous essayerez de transmettre sera perpendiculaire à votre mouvement, et a moins d'avoir les roues avant braquées à 90° (ce qui est impossible sur les voitures), la force que vous essayerez de transmettre ne pourra pas contrer le mouvement de glisse car il n'y aura plus suffisamment de composante de cette force dans la direction où on veut aller.

Une voiture survireuse est très amusante à conduire pour les "pilotes" expérimentés, même si elle ne prévient pas lors de ses décrochages du train arrière qui peuvent être très brutaux. Par contre elle permet en général des vitesses de passage en courbe beaucoup plus rapides et transmet beaucoup mieux les fortes puissances. Les roues motrices des propulsions sont situées à l'arrière et comme sous l'effet de l'accélération la voiture se tasse sur l'arrière, on augmente l'adhérence et donc il est plus facile de faire passer de fortes puissances...

Deuxième exemple : SAAB 900 Gripen (traction)

Principale caractéristique : Sous-virage chronique.

Cette voiture est une des plus puissantes traction de série et possède un comportement sous-vireur très caractéristique. Le poids est principalement situé sur l'avant et donc si on lève le pied en virage, on coupe la force de traction qui emmenait la voiture dans la direction souhaitée. La force centrifuge et l'inertie du moteur avant emmènent la voiture tout droit et produisent le sous-virage: la voiture refuse de tourner.

Si on ré accélère trop fort, les pneus n'adhèrent plus et on "tire" tout droit. Pour pouvoir contrer un sous-virage bien engagé, on peut simplement prier fort ou tenter de freiner.

Ceci a pour effet de reporter le poids de la voiture sur l'avant, donc d'augmenter un peu le grip des pneus avant et surtout on allège l'arrière, ce qui permet de faire décrocher la voiture et de déclencher un début de tête à queue. Ce tête a queue doit tout de suite être contré dès que la voiture pointe dans la direction souhaitée, en remettant les gaz.

Une voiture sous-vireuse est plus sécurisante pour un "pilote" inexpérimenté car elle prévient plutôt les pertes de grip et il suffit souvent de simplement relâcher l'accélérateur pour perdre de la vitesse, retrouver du grip et pouvoir à nouveau tourner.

Troisième exemple : Porsche Boxster (propulsion à moteur central)

Principale caractéristique : Comportement très neutre.

Ce véhicule est très bien équilibré et possède son moteur au centre de la voiture, toutes les masses sont donc centrées. Comme c'est une propulsion, elle a plutôt un tempérament de survirage, mais en fait le comportement est très neutre. Si on lève le pied avec ce type de véhicule, ce n'est pas à cause de la masse décentrée du moteur qu'on glisse ou non, mais grâce au transfert de masse. Si on arrête d'accélérer, on reporte le poids de la voiture sur l'avant, ce qui allège le train arrière, diminue le grip et provoque un tête à queue en cas de freinage Toutes les voitures légères essayent d'avoir le moteur le plus centré possible pour avoir un comportement le plus neutre possible car une voiture légère est très vive, donc elle réagit très (trop) vite pour un pilote.

Quatrième exemple : Subaru Impreza ( 4 roues motrices)

Principale caractéristique : Comportement hyper efficace bien que sous-vireur.

La force de l'Impreza est dans ses 4 roues motrices. Elle possède ainsi 2 fois plus de roues pour faire passer la force due à l'accélération. Elle combine ainsi les deux caractéristiques d'une propulsion et d'une traction. Le grip est ainsi tout le temps au maximum. Si on remet trop les gaz a l'accélération en sortie de virage, l'arrière peut perdre de l'adhérence, l'avant est là pour récupérer le coup. En ligne droite, lors d'un démarrage violent, la voiture se tasse sur le train arrière ce qui procure plus de grip aux pneus de propulsion, l'avant a peut être moins d'adhérence, mais l'arrière compense.

Le problème c'est que la voiture est lourde, donc pour bien prendre un virage, il faut la "jeter" dans le virage. Car si on cherche à resserrer au fur et a mesure le rayon de braquage la force centrifuge et l'inertie de la voiture fait qu'elle sous-vire. De même, si on lève le pied trop brusquement dans une courbe prononcée, la masse de la voiture entraîne un décrochage de l'arrière car la masse se déplace sur l'avant et allège le train arrière.

 

3) Conclusion

Le transfert de masse est donc l'action de faire passer la masse de la voiture sur le train avant ou arrière, en freinant ou en accélérant. Bien maîtrisé, cela peut permettre de mettre la voiture en glisse dans les courbes ou les virages très serré, permettant ainsi d'avoir plus rapidement les roues droites pour ré accélérer en ligne.

Ce transfert de masse sert aussi à tourner lorsque les roues n'ont pas assez d'adhérence pour le faire efficacement en tournant le volant. C'est le cas lors des courses sur glace ou sur terre. Il s'agit en fait de balancer un peu la voiture à droite puis fortement à gauche (si on veut tourner à gauche, l'inverse pour la droite….) pour profiter de l'inertie de la voiture et ainsi la faire tourner toute seul sur son axe (il est nécessaire de donner parfois un léger coup de frein pour augmenter la rotation du train arrière.). On a juste alors à ré accélérer en ligne quand on est face à la sortie du virage. C'est ce qu'on nomme la technique de l'appel/contre-appel.

 

Une autre technique pour faire glisser le train arrière est l'utilisation du frein à main. Il permet de faire perdre l'adhérence aux pneus arrière sans trop relâcher l'accélérateur. Il faut déjà avoir commencé à tourner avant de tirer le frein, les roues arrière perdant l'adhérence, l'inertie arrière prend le dessus et fait tourner la voiture au tour du train avant qui, lui, garde son grip.

ATTENTION: l'utilisation du frein a main est cependant très fortement déconseillé sur une 4 roues motrices. En effet, a moins d'avoir une transmission arrière déconnectable, si vous bloquez vos roues avec le frein à main, c'est comme quand vous faites un pile prolongé sans débrayer: les roues bloquées sont en prises avec le moteur et empêche celui ci de tourner… Bilan: vous calez ! Ou si vous ne calez pas, ce sont vos visco-coupleurs qui en prennent plein la tronche !



2002, Le Gitan. – © Passion Automobile.
 

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Page créée le 05-11-2002

Dernière mise à jour le 02-04-2010